Le rapport GROSPERRIN
Un premier élément de diagnostic du socle commun
Gwénaël Surel, Bureau national
Le 17 novembre 2009, la commission des Affaires culturelles et de l’Education de l’Assemblée nationale créait une mission d’information sur « la mise en oeuvre du socle commun de connaissances et de compétences au collège ». Pendant trois mois, celle-ci, composée de onze députés, membres des différents groupes politiques, a procédé à de nombreuses auditions (35 au total) de personnalités – recteurs, inspecteurs généraux, historiens, sociologues – et d’organisations – syndicats, associations et organismes consultatifs – et s’est déplacée dans des collèges, en particulier dans des établissements de l’éducation prioritaire, classés « Ambition Réussite », pour y rencontrer enseignants et élèves.
Il s’est agi, pour la mission, de faire le point sur la réforme du « socle commun », pour deux raisons
- l’article L.122-1-1 du Code de l’éducation prévoyant que le gouvernement « présente tous les trois ans au Parlement un rapport sur la manière dont les programmes prennent en compte le socle commun et sur la maîtrise de celui-ci par les élèves au cours de leur scolarité obligatoire » et est resté, à ce jour, lettre morte ;
- la seconde raison de ce travail, qui conduit à examiner les performances du collège, tient au fait que les données disponibles laissent penser que les acquis des collégiens font en effet du surplace, voire se dégradent.
Parmi les auditeurs, nous pourrons noter quelques remarques croustillantes au sujet du collège:
– Le SNPDEN a déclaré que le collège est « le lieu qui souffre le plus » ;
– Jean-Paul Delahaye, dans la Revuefrançaise d’éducation comparée n° 3 de septembre 2008, émet l’hypothèse que le collège a été « davantage conçu en fonction de son aval, le lycée [en particulier le lycée général par lequel 35 % d’une classe d’âge accède au baccalauréat général], que de son amont, l’école primaire ».
– F. Dubet déclare : « Le collège est un lieu improbable dont l’imaginaire est celui du lycée bourgeois alors qu’il accueille des classes de certificat d’études ».
Ce rapport pose une question et amène une problématique:
– Cinq ans après son adoption par le parlement, le socle commun existe-t-il au collège ?
– Relancer le socle commun pour rebâtir le collège unique.
5 ans après son adoption par le parlement, le socle commun existe-t-il au collège ?
Le socle commun, une ambition au service de tous les élèves
A l’origine, nous pouvons penser que, pour des raisons diverses et variées, le collège est inefficace pour près de ¾ de ses élèves. Que ce soient les résultats de l’enquête PISA ou encore les enquêtes du HCE, les éléments chiffrés prouvent que le collège n’apporte pas ou peu d’efficience pour les élèves.
Selon le rapport Grosperrin, le collège est aussi le réceptacle des échecs du primaire ; selon le rapport, le collège unique est un faux collège pour tous. De plus, le collège n’a pas connu une croissance de ses moyens comparable à celle des autres secteurs du monde éducatif. Lesmoyens accordés au collège, dans une période d’augmentation générale des moyens du système éducatif, ont toujours été inférieurs à ceux des lycées et des lycées professionnels. Lecollège n’a pas connu d’inflation de ses moyens. Les moyens des réformes ont été pris sur les moyens du collège.
Aussi le rapport précise que l’ensemble des dispositifs d’aide dans le collège (accompagnement éducatif, ODP 3 h, MDP 6h, l’aide au travail personnalisé, les PPRE) n’ont pas toujours permis aux élèves de trouver des solutions à leurs difficultés.
L’ensemble de ces points amène le collège a une obligation de résultats, donnant toute sa place à la maîtrise des compétences. Ce rapport met en avant six vertus du socle commun:
– il responsabilise l’école ;
– le socle permet de clore le débat sur le collège unique en liant ce dernier à la scolarité obligatoire. Le socle est un plancher sur lequel on peut enfin construire le collège unique ;
– le socle permet d’articuler les connaissances aux compétences. Les compétences doivent reposer sur des savoirs ainsi que sur la capacité à les mettre en œuvre dans des situations scolaires et extra scolaires ;
– le socle induit une nouvelle représentation de la scolarité obligatoire permettant d’effacer la rupture entre le premier et le second degré ;
– le socle permet de décloisonner les disciplines et les classes. Philippe Joutard, historien et ancien recteur, précise : « Au 21ème siècle, s’enfermer dans des disciplines, c’est rester au 19ème siècle ».
-le socle commun permet de consacrer les savoirs-être, capacités d’autonomie et d’initiative du vivre-ensemble. Aux tests internationaux, l’élève français est celui qui s’abstient le plus et n’a pas le goût du risque.
Au total le socle est un « plancher » utile pouvant redonner le goût de l’école.
Un collège loin d’être en phase avec le socle commun
Selon Philippe Joutard, la mise en œuvre du socle commun donne une « impression de demi-teinte », de 2005 à 2009. Tout d’abord, de 2005 à 2007, la réforme a été peu accompagnée par le ministère. De plus, il y a eu une prise en compte inégale du socle commun dans les programmes. Le rapport admet que le nouveau DNB organise la cohabitation entre deux formes d’évaluation inconciliables. Cette double évaluation acceptée par le DNB ne facilite pas le travail d’appropriation pour les enseignants et rend la mise en place du socle commun difficile. Aussi, chez les enseignants, on alterne entre incompréhension et lassitude.
Relancer le socle commun pour rebâtir le collège unique
A l’époque de l’audition des rapporteurs, F. Dubet affirmait que « la nation doit reprendre en main le socle commun » et, pour les acteurs de terrain, le parlement doit être « l’aggiornamento du parlement ». Tout élève doit acquérir compétences et connaissances fondamentales pour mener une vie active et responsable.
Une nouvelle approche de l’évaluation des élèves
Le rapport concède qu’il y a une véritable problématique à faire coexister deux systèmes d’évaluation. L’objectif serait de proposer une évaluation fondée sur la confiance pour renverser la « constante macabre ». Le second objectif serait de mettre en place un livret de compétences numérique ayant 4 défis à relever:
– 1er défi : Quel modèle de livret personnel de compétences numériques utiliser quand celui-ci n’a pas été formalisé par le ministère de l’EN ? Le ministère devrait émettre des recommandations de « bonnes pratiques » sur les expérimentations en cours.
– 2ème défi : ce qui fera la valeur et l’utilité d’un livret de compétences numériques, c’est sa précision et sa cohérence dans la gradation du niveau d’exigence et d’acquisition de chacune des compétences.
– 3ème défi : consiste à ne pas transformer le livret de compétences en un outil purement informatique qui ne serait lisible que pour les enseignants. L’outil doit avoir du sens pour l’élève.
– 4ème défi : celui de l’articulation du livret personnel de compétences avec le livret de compétences dont l’expérimentation est prévue par la loi du 24/11/2009. Ce dernier livret doit enregistrer et valoriser les compétences dans le cadre scolaire et extra scolaire. Ce livret serait consacré aux compétences sociales et civiques et à l’esprit d’initiative et d’autonomie, le dernier objectif étant de poser une attestation de maîtrise du socle commun simplifiée et valant brevet.
Des programmes mieux articulés au socle commun et une pédagogie réellement différenciée
Les programmes seraient plus conformes à l’esprit du socle et interdisciplinaires. La prise en compte du socle commun par les programmes du collège est inégale selon les disciplines. Ces derniers doivent faire référence aux savoirs et savoir-faire reconnus par le socle.
Le recteur de Versailles, M. Boissinot, pense qu’il faut dissocier dans les programmes ce qui est essentiel de ce qui l’est moins ; cela impliquerait que davantage de temps pourrait être consacré aux élèves en grande difficulté qui représente en moyenne 15 %.
L’objectif serait de mettre en place des parcours d’apprentissage variés au sein de la classe et de proposer un accompagnement éducatif au service du socle commun.
Des enseignants formés au socle commun et aux classes hétérogènes
Le rapport demande à ce que la formation des enseignants accorde plus de place au socle commun à partir de l’arrêté du 19 décembre 2006 définissant le cahier des charges de la formation des maîtres.
Il serait demandé aux enseignants une pratique inspirée du Primaire afin que le collège ne reste pas l’antichambre du lycée général. Cette pratique devrait évoluer sur trois points:
– savoir gérer une classe hétérogène ;
– accorder davantage de place au travail interdisciplinaire ;
– accorder davantage de travail en équipe ;
– le rapport propose de réinventer la bivalence.
Afin de pouvoir travailler l’ensemble des points abordés ci-dessus, le rapport préconise un temps de présence des enseignants accrus dans l’établissement, qui pourrait aller jusqu’à 24 heures.
Des politiques de vie scolaire plus ambitieuse
A partir de dispositifs tels que « La mallette des parents » ou l’association « je tu il » et le programme « cet autre que moi », il pourrait être développé des actions en partenariat qui permettraient une efficience des politiques de vie scolaire.
Un pilotage des établissements plus incitatifs
Ce pilotage s’appuierait à partir d’une marge de manœuvre pour les collèges volontaires et des inspections appuyant les équipes pédagogiques en étant un conseiller à la fois avec un regard pédagogique externe et un regard didactique sur les matières. L’inspection générale serait alors réorganisée autour des grands pôles du socle commun.
Un mode d’organisation des écoles et des collèges à généraliser: les réseaux Ambition Réussite
Il est posé, dans ce rapport, la réorganisation des structures pédagogiques afin de regrouper, dans un avenir pas trop lointain, école primaire et collège.
A l’issue du rapport sont ressorties 16 propositions:
– Proposition n° 1 :Respecter l’obligation d’information du Parlement sur la mise en œuvre du socle commun de connaissances et de compétences.
– Proposition n° 2 :Actualiser les dispositions législatives relatives au socle commun.
– Proposition n° 3 :Fonder l’évaluation sur la confiance.
– Proposition n° 4 :Élaborer les programmes à partir des thèmes de convergence entre les disciplines.
– Proposition n° 5 :Assurer la continuité des apprentissages entre le primaire et le collège en refondant les cycles d’apprentissage, en formant davantage les enseignants à « faire classe », à l’interdisciplinarité et au travail en équipe, en développant la bivalence des professeurs et en permettant des échanges de service entre ceux qui enseignent en CM2 et en sixième.
– Proposition n° 6 :Différencier la pédagogie au sein même de la classe, notamment par le recours à des groupes de compétences.
– Proposition n° 7 :Contractualiser l’accompagnement éducatif de deux heures pour en faire un outil d’aide à l’acquisition du socle commun.
– Proposition n° 8 :Élaborer un « mode d’emploi » du socle commun, conçu par niveau et non par discipline, pour la formation initiale et continue des enseignants.
– Proposition n° 9 :Inclure dans le service des enseignants de l’éducation prioritaire une heure de concertation et augmenter, à terme, le temps de présence de tous les professeurs du second degré dans les établissements.
– Proposition n° 10 :Généraliser le dispositif d’implication des parents dans la scolarité, expérimenté dans l’académie de Créteil, à tous les collèges.
– Proposition n° 11 :Expérimenter des programmes de lutte contre la violence reposant sur l’éducation à la responsabilité affective et sexuelle.
– Proposition n° 12 : Expérimenter l’attribution de budgets aux collèges permettant de financer des projets interdisciplinaires qui mettent en valeur la compétence 7 (autonomie et initiative) du socle commun.
– Proposition n° 13 :Faire des recteurs les garants de la mise en place du socle commun.
– Proposition n° 14 :Responsabiliser les établissements, en leur attribuant, à leur demande, un volume d’heures non affectées et de postes à profil en échange d’engagements sur des objectifs précis.
– Proposition n° 15 :Structurer, pour le second degré, l’inspection générale de l’Education nationale, par grands champs, recouvrant plusieurs disciplines, ou par cycles d’apprentissage.
– Proposition n° 16 :Expérimenter des « réseaux du socle commun » mettant en relation des écoles et un collège, sur le modèle des réseaux Ambition Réussite de l’Education prioritaire.
– Proposition n° 17 :Fonder la maîtrise du socle commun sur la certification des connaissances et les compétences acquises par les élèves selon les modalités suivantes :
– mettre en place un livret de compétences numériques évaluant régulièrement les acquis des élèves tout au long de la scolarité obligatoire ;
– récompenser, de manière symbolique, les élèves franchissant des étapes significatives dans l’acquisition des compétences du socle commun ;
– délivrer une attestation simplifiée de maîtrise des connaissances et compétences du socle aux élèves accomplissant avec succès des épreuves terminales reposant sur quelques exercices et mises en situation réelle ;
-faire de cette attestation, d’ici 2012, le nouveau diplôme national du brevet.
Le SNPDEN, lors du CSN de novembre 2008, s’était déjà interrogé au sujet de l’acquisition du socle commun au collège. Il a rappelé, lors de son congrès en mai 2009, qu’il s’agissait d’une priorité pour le collège. Il avait rappelé que la double évaluation au niveau de l’acquisition du DNB rendait le travail d’appropriation par les équipes enseignantes difficile et ne facilitait pas la mise en pratique du socle commun.
Au-delà des propositions avancées dans ce rapport, le SNPDEN pose trois éléments prioritaires pour la mise en place du socle commun :
– Le livret doit être au service de nouvelles pratiques pédagogiques dans la classe et non un simple élément de validation et certification.
– Les nouvelles pratiques doivent être organisées et repensées en harmonie avec les corps d’inspection. La transdisciplinarité ne s’improvise pas ; elle doit donc être accompagnée dans le cadre de la formation initiale et continue des enseignants.
– Cette mutation des pratiques devra s’accompagner par du temps et des moyens afin que les enseignants puissent pleinement s’investir.
- Consulter le Rapport Grosperrin déposé en avril 2010 en conclusion des travaux de la mission sur la mise en œuvre du socle commun de connaissances et de compétences au collège
- Lien : https://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rap-info/i2446.pdf
Le rapport REISS
Quelle direction pour l’école du XXIème siècle ?
(Valérie Faure, Documentaliste)
Pas de réponse unique pour le député REISS mais confiance aux acteurs de terrain pour expérimenter regroupements scolaires, établissements publics du primaire, écoles du socle commun.
Au terme d’une mission de six mois réalisée à la demande du Premier ministre, le député Frédéric Reiss a remis, le 29 septembre 2010, à Luc Chatel son rapport dans lequel il formule huit recommandations pour progresser dans l’objectif majeur de donner, à chaque élève, tous les atouts en mains pour réussir. Il y propose d’explorer plus avant quelques chantiers sur « la gouvernance » de l’école : structuration des écoles, rôles des partenaires, missions du directeur… et met l’accent sur l’impossibilité d’élaborer un modèle unique en raison des fortes spécificités territoriales.
L’évolution juridique vers des « regroupements » en réseau rural mais aussi la force pédagogique des continuités de « l’école du socle commun » pour les grosses écoles et leur collège de recrutement font partie des mesures préconisées par le député, qui met le contrat volontaire et l’expérimentation partagée au cœur de ses propositions. L’instauration d’un pacte éducatif entre les services de l’État et les collectivités territoriales, dans lequel chaque école mettrait en œuvre un contrat éducatif et dont le projet pédagogique serait la clé de voûte, est ainsi à l’ordre du jour.
Consulter le rapport et sa synthèse sur le site du ministère
www.education.gouv.fr/rapport-reiss-2010/
Les 8 recommandations du rapport REISS
1- Revoir l’organisation territoriale du service public de l’éducation, notamment en consolidant les regroupements d’écoles
La qualité de l’enseignement, si elle résulte avant toute chose de celle du geste pédagogique, dépend pour une grande part de l’organisation de l’action collective et de ses conditions d’exercice. Les écoles de trop petite taille sont un frein à une gestion optimale des ressources humaines dans le premier degré. De plus, sans taille minimale, une direction d’école n’a que peu de sens. Si les regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI) participent de l’objectif ministériel d’un développement équilibré du territoire, ils sont aussi un lieu privilégié pour mieux coordonner les activités des écoles et des communes en matière d’éducation.
Créer la catégorie juridique des regroupements scolaires (RS), lieux privilégiés d’innovation
Le regroupement scolaire serait à créer par convention entre l’autorité académique et la (ou les) commune(s) ou intercommunalité(s) concernée(s) après avis du conseil académique de l’Éducation nationale. Le motif principal du regroupement a vocation à être pédagogique, l’objectif suprême restant l’amélioration des apprentissages. Un décret donnerait une définition des regroupements scolaires et, surtout, conditionnerait leur existence à la volonté de mettre en œuvre un projet éducatif commun : pas de projet, pas de regroupement.
2. Laisser expérimenter les établissements publics du primaire (E2P)
Depuis la loi du 13 août 2004, force est de constater que l’expérimentation des établissements publics d’enseignement primaire est une occasion manquée. Pour des écoles d’une certaine taille, l’intérêt pédagogique et organisationnel implique plus d’autonomie et davantage de rapprochement des différents temps de vie de l’enfant.
La solution de l’établissement public du primaire (E2P) pourrait être expérimentée dans les écoles de 14 classes et plus (le directeur y a une décharge totale). Il est plutôt recommandé de « labelliser » les expérimentations que les acteurs prêts à agir ont en projet, que d’imposer des modalités décidées en amont. Un opérateur indépendant devrait conduire l’évaluation de ces expérimentations. L’hypothèse d’un directeur d’E2P soutenu par une structure administrative relevant de la commune ou de l’intercommunalité devrait figurer dans les protocoles d’expérimentation. L’E2P doit disposer dès le départ d’un budget ; l’agent comptable de la collectivité locale deviendrait celui de l’E2P. Une dotation de fonctionnement incitative de l’État serait de nature à partager les efforts.
3. Placer le contrat éducatif au centre du pilotage de proximité
Un projet collectif donne du sens à l’action de groupe. Confrontée à de multiples interlocuteurs, à des situations inédites et à divers intervenants, une école doit rendre sa politique lisible. Le « projet pédagogique », qui définit la manière dont l’équipe enseignante met en œuvre les tâches qui lui sont confiées, serait adopté en conseil des maîtres.
Un « contrat éducatif », incluant le « projet pédagogique », porterait sur l’ensemble des aspects d’intérêt commun pour la communauté éducative. Il s’élaborerait en concertation et devrait comporter des indicateurs de performance. L’évaluation des enseignants par les inspecteurs prendrait en compte la réalisation du projet pédagogique et plus généralement du contrat éducatif.
4. S’appuyer sur les leaders pédagogiques, les directeurs d’école
Le directeur d’école n’occupe pas simplement une fonction : il exerce un métier à part entière. Il endosse des responsabilités d’ordre pédagogique, relationnel, administratif et managérial.
Après sa mission première de fédérer autour du contrat éducatif, le directeur est l’interlocuteur privilégié des élus locaux et des parents d’élèves. Il devrait être recruté parmi les enseignants chevronnés ayant au moins trois ans d’ancienneté dans le premier degré. Le directeur devrait pouvoir procéder lui-même à des recrutements de type EVS et avoir des marges de manœuvre en matière de formation continue pour lui-même et pour ses adjoints.
Le directeur devrait être le représentant de l’État dans l’école et représenterait l’école en toutes circonstances. Le caractère spécifique des fonctions exercées implique un plan de carrière et une nette revalorisation de la rémunération indemnitaire.
Le statut juridique des directeurs d’école pourrait être celui d’un détachement dans le corps des personnels de direction ou dans un emploi fonctionnel. Enfin, pour les enseignants participant aux fonctions de direction, pourquoi pas un partage de décharge ?
5. Créer un observatoire des bonnes pratiques
Pour l’institution, il convient de savoir repérer les bonnes initiatives, d’en faire évaluer la qualité et de diffuser celles qui ont une influence bénéfique sur les résultats scolaires. Un observatoire des bonnes pratiques complèterait la batterie d’outils du ministère ; il recenserait des situations remarquables dans les domaines didactiques, pédagogiques ou organisationnels comme autant de recettes utilisables par le plus grand nombre, ou encore des pilotages exemplaires d’écoles primaires.
6. S’engager sans tarder dans la perspective de futures écoles du socle commun
L’école du socle commun est une réalité dans de nombreux pays. En France, le trop grand nombre d’enfants en difficultés à l’entrée en 6ème incite à étudier la pertinence d’un rapprochement école-collège. Le livret personnel de compétences est une avancée car il s’inscrit dans le continuum pédagogique de 6 ans à 16 ans. Aujourd’hui, les mentalités ne sont pas prêtes pour l’école du socle commun ; pour les faire évoluer, une politique de petits pas s’impose. La continuité éducative au cours de chaque cycle et tout au long de la scolarité sera favorisée par des échanges d’enseignants entre le premier et le second degré. La masterisation pour la formation des maîtres devrait les faciliter. Au-delà des RAR et des SEGPA, des petits collèges et les écoles de leurs secteurs de recrutement devraient expérimenter le dispositif, notamment pour l’apprentissage précoce des langues vivantes. Le passage aux écoles du socle commun nécessitera le respect d’un cahier des charges administratif, juridique et financier d’une ampleur rien moins que considérable. Un débat au Parlement sur le sujet serait sans doute bienvenu.
7. Conclure un pacte éducatif entre services de l’État et collectivités
La juxtaposition des temps scolaires et périscolaires de l’enfant met en lumière l’imprécision des attributions entre communes, intercommunalités et État. Si l’union fait la force, l’intuition comme l’analyse militent en faveur d’une synergie plus profonde entre les uns et les autres, sans doublons.
Mieux faire entrer la commune dans l’école, mieux faire vivre l’école dans la cité
La mise en œuvre d’une démarche de partenariat fondée sur le développement de projets, la mise en cohérence des programmations, le partage d’une vision commune de l’école, pourraient faire consensus. Un rapport annuel ou bisannuel consacré à l’effort public d’enseignement et d’éducation (État, collectivités publiques et autres administrations) devrait être communiqué au Parlement. Les dotations de l’État et des communes aux écoles ou établissements pourraient s’envisager avec des financements supplémentaires privilégiant l’esprit d’entreprendre et les bonnes initiatives. « Une école doit être rutilante » : aussi faudrait-il optimiser les investissements scolaires pour lui permettre de rester un temple du savoir et du savoir-être.
8. Améliorer le poste de pilotage en recentrant les inspecteurs de l’Éducation nationale sur leur cœur de métier
Le travail des IEN, chefs de circonscription, est celui de pilote de l’expertise pédagogique. Aux côtés des inspecteurs d’académie, ils animent et mettent en œuvre dans le département la politique éducative du ministère. À ce titre, le rôle des conseillers pédagogiques mérite d’être conforté. Les IEN sont également des évaluateurs et, parfois, jouent un rôle de super directeur dont il faudrait qu’ils s’éloignent.
Un IEN doit avant tout inspecter et devrait s’affirmer davantage dans les relations école-collège. Le recrutement et la formation des personnels, la gestion de la carte scolaire restent leur apanage.
Le rapport du HCE
Bilan des résultats de l’école 2010 – Rapport du Haut Conseil de l’Education sur le collège (Valérie Faure, documentaliste)
Construire « l’Ecole du socle commun », refonder le statut et la formation des enseignants, rendre les établissements scolaires plus autonomes, tels sont les objectifs principaux autour desquels s’organisent les recommandations émises dans le rapport du Haut Conseil de l’éducation (HCE), dans le cadre de son bilan annuel des résultats de l’Ecole, remis le 1er octobre au ministre et consacré, pour 2010, au collège
Loin de proposer la fin du « collège unique », le HCE propose au contraire de lui donner une véritable existence en créant une « École du socle commun », en lieu et place du collège actuel, ce qui permettrait d’instaurer une réelle continuité entre l’école et le collège. Pour cela, il appelle à la mobilisation de tous les acteurs autour de l’objectif de l’acquisition de ce socle commun.
Organisé en trois parties (une description de la situation actuelle – jugée préoccupante -, l’analyse des causes de cette situation et les propositions pour l’avenir), le rapport se termine ainsi par une quinzaine de recommandations. Parmi les principales pistes esquissées :
– un renforcement de la continuité entre l’école primaire et le collège pour atteindre les objectifs du socle commun ;
– une formation des enseignants aux pratiques les plus efficaces, à l’enseignement en classe hétérogène et à la psychologie de l’adolescent ;
– une plus forte implication des parents d’élèves ;
– un enseignement de la culture manuelle et technologique « à parité d’estime » avec les disciplines traditionnelles ;
– davantage d’autonomie donnée aux chefs d’établissement et une modification de l’organisation pédagogique des collèges.
Pour consulter l’intégralité du rapport sur le site du HCE
www.hce.education.fr/gallery_files/site/21/60.pdf
Les recommandations du HCE
1. Un objectif clair qui s’impose à tous a été fixé à notre système éducatif par la loi du 23 avril 2005 : garantir à tous les élèves la maîtrise du « socle commun de connaissances et de compétences » à la fin de la scolarité obligatoire. Pour atteindre cet objectif, il est nécessaire de passer du « collège unique » à l’« École du socle commun ». Dans cette perspective, le Haut Conseil de l’Éducation préconise que :
a) l’institution et ses représentants à tous les niveaux, notamment les corps d’inspection, tiennent un discours cohérent et mobilisateur sur le socle commun afin de créer autour de celui-ci une vraie dynamique et d’en garantir la mise en œuvre coordonnée et efficace ;
b) les exigences du socle soient enfin prises en compte dans les programmes de toutes les disciplines ;
c) soit introduit pour tous les élèves, de la 6ème à la 3ème, à parité d’estime avec les disciplines traditionnelles, un enseignement de culture manuelle et technologique permettant de valoriser des aptitudes différentes ;
d) soit renforcée la continuité entre l’école primaire et le collège, en fusionnant les programmes actuels de la loi organique relative aux lois de finance (LOLF) « Enseignement scolaire public du premier degré » et « Enseignement scolaire public du second degré » en un programme unique « Enseignement scolaire public du socle commun », pour éviter que la répartition des moyens ne privilégie systématiquement le lycée au détriment du collège et pour faciliter le travail du Parlement dans son examen de la mise en œuvre du socle commun.
2. La réussite de l’« École du socle commun » dépendra pour une large part de la formation que recevront les enseignants et de leur capacité à mettre en œuvre des pratiques pédagogiques permettant de faire réussir tous les élèves. À cet effet, le Haut Conseil de l’Éducation demande que :
a) les universités, en liaison avec les rectorats, offrent systématiquement aux étudiants qui se destinent aux métiers de l’enseignement des stages dès la première année de master afin que les futurs candidats aux concours de recrutement soient très tôt confrontés à la réalité et aux exigences du métier d’enseignant ;
b) la formation initiale et le concours de recrutement des futurs enseignants permettent de s’assurer de leur capacité et de leur goût à exercer le métier d’enseignant en collège ; il faudrait pour cela distinguer des dominantes ou des mentions (maternelle, élémentaire, collège, lycée général et technologique, lycée professionnel), ce qui pourrait conduire certains professeurs de collège à enseigner plusieurs disciplines ;
c) les enseignants soient formés à l’enseignement en classe hétérogène afin d’assurer, dans la classe, la réussite de chaque élève, le redoublement devant avoir un caractère exceptionnel ;
d) la direction générale de l’Enseignement scolaire dote rapidement les enseignants des outils leur permettant de faire acquérir et d’évaluer régulièrement et précisément chacune des compétences du socle commun ;
e) le service des enseignants ne soit plus uniquement défini par un nombre d’heures hebdomadaires d’enseignement devant les élèves mais redéfini de manière à prendre en compte la diversité de leurs missions (cours, travail d’équipe, aide au travail, tutorat…), ce qui pourrait conduire à un allongement de leur présence dans l’établissement ;
f) les ateliers artistiques, culturels ou sportifs proposés aux élèves concourent de manière explicite et méthodique à l’acquisition des compétences du socle commun.
3. Octroyer aux établissements plus de responsabilités dans leur organisation pédagogique a une influence positive sur leurs résultats. Pour donner aux principaux de collèges plus d’autonomie dans la direction de leur établissement, le Haut Conseil de l’Éducation propose que :
a) pour chaque collège, un budget rassemblant l’ensemble des charges de fonctionnement soit établi et communiqué à ses responsables ;
b) tous les collèges puissent disposer d’une certaine latitude dans la répartition des moyens qui leur sont attribués, cette marge de manœuvre devant représenter au moins 10 % de leur dotation ;
c) la mesure permettant aux principaux de collèges d’émettre un avis sur l’affectation d’un enseignant dans leur établissement, récemment accordée aux établissements les plus difficiles, fasse l’objet d’une expérimentation beaucoup plus large ;
d) soit mise en œuvre une nouvelle organisation du collège devant permettre aux élèves de bénéficier d’une prise en charge éducative continue depuis leur arrivée au collège le matin jusqu’à leur départ en fin d’après-midi, ce qui suppose des conditions matérielles d’accueil adéquates et une présence plus forte d’adultes pour encadrer les élèves.
Autres rapports
♦ La mise en oeuvre du livret personnel de compétences au collège : Rapport conjoint IGEN/IGAENR n° 2012-094 – Août 2012
♦ L’avenir des années collège dans les quartiers sensibles
Rapport d’information de Mme Fabienne KELLER, fait au nom de la Délégation à la prospective n° 352 tome I (2010-2011) – Mars 2011
♦ Mise en oeuvre de la circulaire n° 2006-105 du 23 juin 2006 relative à la note de vie scolaire
Jean-Yves HERBEUVAL / Groupe EVS – n° 2007-017 – Février 2007
♦ Le module de découverte professionnelle
Rapport IGEN – René Cahuzac, Raymond Riquier, Jacques Thierry -n° 2007-010 -Janvier 2007
♦ Rapport sur la grille horaire des enseignements au collège
Rapport conjoint IGEN-IGAENR- IGF : Pierre Lepetit, Claudine Peretti, Xavier Sorbe, Antonin Beurrier – n° 2006-032 – Octobre 2006
♦ Recommandations pour le socle commun
Haut Conseil de l’Education – Mars 2006
♦ Mise en oeuvre du socle commun
Haut Conseil de l’Education – 2011
♦ L’évaluation des collèges et des lycées en France
Bilan critique et perspectives en 2004 – Jean ÉTIENNE, IGEN – Roger-François GAUTHIER, IGAEN – n° 2004-118 – Juillet 2004
♦ L’enseignement du français au collège
MEN / IGEN – n° 2002-046 – Septembre 2002
♦ Rapport sur l’évolution du collège
Philippe Joutard – Mars 2001
♦ Le Collège de l’an 2000
Rapport à la ministre déléguée chargée de l’enseignement scolaire – François Dubet, Alain Bergounioux, Marie Duru Bellat – Décembre 1999