Faut-il supprimer la notation ? Pierre Merle (mai 2013)

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Pierre Merle, sociologue de l’éducation, invité par l’UNSA dans notre académie, a donné des conférences les mardi 30 avril et jeudi 2 mai 2013. Professeur à l’IUFM de Bretagne, université européenne de Bretagne, il est devenu enseignant-chercheur après avoir été professeur de sciences économiques et sociales pendant 10 ans. Spécialiste des questions scolaires, il a écrit de nombreux ouvrages sur les pratiques d’évaluation et de notation des élèves, ainsi que sur la démocratisation de l’enseignement. Parmi ces publications, Les notes : secrets de fabrication, paru aux éditions PUF en 2007.

Vous avez sans doute en mémoire l’entretien avec Pierre Merle publié dans le numéro 202 de Direction. Après lecture de cet article, Marie-Laure Brégand, son ex collègue de l’IUFM de Bretagne, actuellement personnel de direction à Saint-Leu à La Réunion, a proposé aux responsables de sa section académique de l’inviter à partager ses recherches et sa réflexion sur l’évaluation. Claude Carpentier, secrétaire académique, a immédiatement proposé à la section enseignante (SE-UNSA) de s’associer à l’organisation de sa venue.

« L’évaluation, quel type de notation pour redonner confiance aux élèves ? »

Deux conférences ont donc été organisées, sur le thème : « L’évaluation, quel type de notation pour redonner confiance aux élèves ? » Elles se sont déroulées le 30 avril et le 2 mai 2013 dans les amphithéâtres des campus de Saint-Denis et du Tampon. Une organisation efficace assurée entre autres par Éric Dijoux, secrétaire académique de l’UNSA-Éducation ; un plan de communication relayé par une bonne couverture médiatique ont assuré un franc succès à l’entreprise.
Pierre Merle s’est également rendu dans un collège de Saint-Denis afin de réfléchir avec les enseignants sur les bilans d’évaluation : comment passer du « conseil de classe » au « conseil de progrès» ? Au total, plus de 180 professionnels de l’éducation ont pu profiter du passage de Pierre Merle dans l’île.
Après avoir établi les aléas de la notation (les études depuis 1936 démontrent avec constance des écarts de 8 à 13 points selon les disciplines pour l’évaluation d’une même copie !), il explique ces différences par des biais sociaux et des effets de stéréotypie. Dans une approche inter-actionniste, il définit la notation comme un « arrangement ». Il démontre à quel point la notation sur 20 points peut avoir des effets décourageants, voire assassins, sur l’élève en difficulté.
Le sociologue ne s’est pas contenté d’analyser des phénomènes de distorsion (analyses très éclairantes au demeurant). Dans la dernière partie de sa conférence, particulièrement appréciée, il a défini des principes et proposé des pratiques pour une notation au service de l’efficacité et de l’équité. En bref, il a dessiné les contours d’une notation plus professionnelle et plus éthique.

Des valeurs en arrière-plan

Dans chacun de ses propos, les auditeurs ont pu apprécier la rigueur intellectuelle du chercheur, économiste de formation, mais aussi les valeurs qui sous-tendent constamment ses approches : respect de la dignité de l’élève, pédagogie de l’encouragement et de la réussite, garantie de l’égalité des chances. Sa parole claire et vivante, illustrée d’exemples vécus renvoyant à l’expérience de chacun, a suscité de nombreux échanges auxquels il a fallu imposer un terme.
La formation tout au long de la vie nécessite des efforts financiers particuliers à La Réunion en raison de l’insularité et l’éloignement de la métropole. L’UNSA a contribué généreusement à cet effort. Les organisateurs ont dit leur fierté d’appartenir à un syndicat qui, parallèlement à des thématiques liées au métier et à la carrière, accorde une place importante à la réflexion et au débat pédagogiques. Ce genre d’événement correspond en effet à un besoin profond : besoin de prendre de la distance, de rencontrer des intellectuels qui offrent un éclairage nouveau, qui permettent de mieux réfléchir aux actes et aux choix quotidiens de nos vies professionnelles. Pour conclure, ils ont exprimé le souhait que de telles initiatives se multiplient.

Bibliographie
? La compétence en question : école, insertion, travail, Presses universitaires de Rennes, 1993.
? La citoyenneté aujourd’hui : extension ou régression ? Presses universitaires de Rennes, 1995.
? L’évaluation des élèves : enquête sur le jugement professoral, Paris, PUF, 1996.
? La citoyenneté étudiante : intégration, participation, mobilisation, Paris, PUF (avec Christian Le Bart), 1997.
? Sociologie de l’évaluation scolaire, Paris, PUF, 1998.
? Nouvelles dimensions de la précarité, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2001.
? La démocratisation de l’enseignement, Paris, Repères, La Découverte, 2002.
? Le droit et l’école : de la règle aux pratiques, Presses universitaires de Rennes, 2003.
? L’élève humilié. L’école : un espace de non-droit ? Paris, PUF, 2005, nouvelle édition en 2012.
? Les notes : secrets de fabrication, PUF, 2007.
? Robert Merle : une vie de passions, Éditions de l’Aube, 2008.
? La démocratisation de l’enseignement, Paris, Repères, La Découverte, Nouvelle édition, 2009.
? La ségrégation scolaire, Paris, Repères, La Découverte, 2012.
(fin encadré)

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